Naku press publie ci-après la déclaration du Groupe FLNKS au congrès du pays lors du vote de la motion de censure déposée par le groupe Calédonie Ensemble. Une motion de censure finalement rejetée , seuls 18 voix/54 ont voté pour , dont le Groupe Uni et Pascal NAOUNA de l'Union Calédonienne.
Groupe
Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste
SEANCE
PUBLIQUE
21
DECEMBRE 2012
Par Caroline
Machoro-Reignier
Monsieur
le Président du Congrès
Monsieur
le Président du Gouvernement
Chers
collègues
Mesdames,
Messieurs
Il nous est demandé de nous exprimer sur une motion de
censure déposée par le groupe CALEDONIE-ENSEMBLE visant à remettre en cause la
responsabilité du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Il s’agit d’une procédure inédite, encore jamais
utilisée dans le cadre du fonctionnement de nos institutions. C’est dire que
nous avons à faire, ici, à des précurseurs en mal d’aventures et de nouveautés
qui ont fait le choix de cette innovation après avoir usé la démarche de la
démission à répétition.
Je ne reviendrai pas sur le contenu de cette motion de
censure, au sujet de laquelle les uns et les autres viennent de s’exprimer.
Je n’en retiendrai que ceci :
-
« OUI,
mille fois OUI », nous avons pris du retard sur le processus de
décolonisation et d’émancipation qu’est l’Accord de Nouméa,
-
« OUI, mille fois OUI », nous menons
une lutte de tous les instants et devons faire preuve d’une vigilance à
toute épreuve pour éviter les tentatives
incessantes de dévoiement de cet Accord.
-
« OUI, mille fois OUI », c’est au
quotidien que nous devons mener le combat pour son application dans son esprit
et dans sa lettre.
Mais, tout ceci n’a rien de nouveau !
Et je le dis avec d’autant plus de force, que dès la première mandature de son entrée en vigueur, que l’on s’en
souvienne, il nous a fallu nous mobiliser, nous les militants de l’UNION
CALEDONIENNE, nous les militants du
FLNKS, nous les Indépendantistes, signataires, partenaires de l’Accord de Nouméa, pour la mise en œuvre pleine et entière de ses
dispositions.
Combien de recours nous a-t-il fallu intenter auprès
du Tribunal Administratif, qui nous a, d’ailleurs, chaque fois, donné raison,
pour obliger le Gouvernement de l’époque à respecter la collégialité et
le contreseing. S’en est suivie sa chute
en Novembre 2002 que nous avons perpétrée
pour sensibiliser la population sur les dérives organisées par votre
coalition « loyaliste », c’est ainsi que vous vous qualifiiez alors,
vous les non indépendantistes, pour remettre en cause un Accord de Nouméa dont vous veniez de
mesurer l’orientation irréversible vers la Souveraineté de notre Pays.
C’est la mobilisation, ce sont les manifestations lors
de la venue du Président CHIRAC pour le respect de la parole donnée et
pour la mise en œuvre du corps électoral
gelé qui consacre une citoyenneté propre à notre Pays, citoyenneté qui doit, si nous devions en
prendre la décidons, se traduire en nationalité à l’issue du processus.
Mais c’est aussi le sens du compromis et de la démocratie que nous, nous avons accepté,
quand vous, vous avez décidé de faire valoir votre majorité dite loyaliste,
contre la minorité indépendantiste.
A aucun moment, ces combats pour le respect de la
parole donnée n’ont empêché le fonctionnement normal des institutions.
A aucun moment nous n’avons refusé de siéger.
Et, lorsque vous avez décidé de nous exclure, de nous
« purger », selon vos propres termes, des commissions internes du congrès et des organismes extérieurs, nous
avons continué à porter nos propres engagements pour faire vivre l’Accord de
Nouméa.
A aucun
moment nous ne nous sommes réfugiés dans la posture du pauvre CALIMERO.
Puis quand, après les élections législatives de 2007,
la déchirure s’est opérée dans vos rangs pour cause de trahison et de
vengeance, nous, les indépendantistes, conscients de la nécessaire
représentation de tous les calédoniens au sein de la première institution du
Pays, soucieux d’instaurer le débat d’idées entre partenaires d’un accord librement
consenti pour la construction d’une Communauté de Destin, au nom de ces
valeurs, nous vous avons cédé des postes au sein des commissions internes du
Congres desquelles vous vous étiez vous-mêmes exclus.
Alors, à ceux qui, aujourd’hui, se plaignent de
retards, qu’ont-ils fait en Mars et
Avril 2011 ? Et je ne remonterai pas plus loin dans le temps.
Des
démissions à répétition et une véritable guerre de tranchée qui a porté
préjudice à la marche normale de nos institutions et à l’exercice des responsabilités
que nous nous devons vis-à-vis des gens qui nous placés ici pour veiller sur
leurs intérêts.
L’objectif, personne ne s’y est jamais trompé, était
alors et est, encore aujourd’hui, de bloquer les institutions pour que
CALEDONIE ENSEMBLE retrouve une place de leadership au sein d’un pacte
républicain « refondé ». Une prise d’otage de l’Accord de Nouméa dans
le seul but de satisfaire une ambition démesurée, procédé qui n’a pris fin qu’avec la
modification de la Loi Organique, ce qui n’est pas une opération anodine, quand
même.
Pour notre part, nous continuons à revendiquer notre
place dans la conduite des affaires de ce Pays, notre responsabilité dans la
mise en œuvre de l’Accord de Nouméa, et c’est ainsi que nous nous sommes engagés
dans un gouvernement nouveau respectueux
des idées portées par les élus du Congrès et pour la désignation d’un
indépendantiste, Rock Wamytan, à la
présidence du Congrès. Il aura fallu 23 longues années après la poigné de mains de Jean-Marie
TJIBAOU et Jacques LAFLEUR, un acte politique majeur à jamais gravé dans la
mémoire calédonienne, pour qu’enfin se réalisent le partage et le rééquilibrage
politique.
Des avancées aujourd’hui
remises en cause.
L’état d’esprit que nous avons porté ces deux
dernières années, l’ouverture dont nous avons fait preuve et que nous
continuons de démontrer vis-à-vis de l’ensemble de nos partenaires non
indépendantistes, nonobstant nos
différences, et sans chercher à amplifier, de manière sournoise, les
écarts qui vous séparent, s’inscrivent en droite ligne de cette poignée de
main.
Comment,
autrement, réaliser nos engagements communs
pour l’émancipation de notre PAYS ?
La mise en place au Congrès, des commissions spéciales
« Pour la Réforme Fiscale » et « Vie chère » pour l’élaboration et le suivi des accords
économiques et sociaux s’inscrit dans ce schéma qui traduit notre
volonté de faire converger nos points de vue pour parvenir à l’entente sur les
dossiers fondamentaux de l’Accord de Nouméa, comme pour une meilleure
efficacité à répondre aux préoccupations quotidiennes de nos concitoyens. Nos
partenaires de la Société Civile partagent ces soucis et nous soutiennent dans notre démarche.
La reprise des travaux sur le grand chantier du projet
éducatif calédonien qui doit fonder le socle commun de l'enseignement de notre
pays, qui doit intégrer la maîtrise d'une langue kanak au même titre que la
langue française est une réalité bien que gênée par des problèmes de calendrier
au sein même du Congrès.
C’est aussi, sous ce mode de gouvernance, que nous
avons budgété, entre autres, le chantier du pôle sanitaire de Koné dont les
travaux débuteront l’an prochain.
L’insertion de notre pays dans sa région a, dans ce
contexte, connu un nouveau départ. La participation remarquée de la Nouvelle-Calédonie
au Forum des Iles du Pacifique avec ce grand pas en faveur de la protection
élargie de notre environnement marin, la présidence par la NC de la 23ème
Conférence du PROE qui s’est déroulée en Septembre à Nouméa avec des visites
sur sites à Goapain et l’Ile Ouen, la Convention de partenariat signée, cette
année, entre la Nouvelle-Calédonie et la CPS, les accords interparlementaires
initiés par le Président Wamytan entre le Congrès de la NC et les parlements du
Vanuatu et de Fidji et, au delà de la Région Pacifique, avec l’Assemblée
Nationale Française, la tenue à Nouméa, l’année prochaine du Sommet des Pays
Mélanésiens du « Groupe Fer de Lance » qui verra le FLNKS en
endosser la présidence, la concrétisation, dès 2013 de la représentation
diplomatique de notre Pays à l’étranger.
C’est aussi la finalisation du Schéma
Nouvelle-Calédonie 2025, que le récent Comité des Signataires vient de
confirmer comme étant le cadre logique des politiques publiques du Pays,
notamment le Schéma Industriel et Minier.
C’est encore la mise en œuvre du Fonds de Garantie
en faveur du développement sur terres coutumières, la création des ZODEP pour une meilleure
intégration de la « Brousse » et des « Broussards » dans le
monde économique.
C’est aussi et, il était grand temps, le courage de
s’attaquer au désenclavement terrestre, maritime et aérien des zones les plus
reculées du Pays.
En résumé, c’est un développement social et économique tournée vers la Calédonie profonde, bien
au-delà de Nouméa et du Grand Nouméa. C’est le rayonnement politique de notre
Pays dans la Région.
Ce ne sont là que quelques exemples d’opérations
décidées et mises en œuvre dans ce contexte particulier de travail et de
réflexion qui transcendent les politiques partisanes. C’est la concrétisation
de politiques inscrites par le FLNKS dans les Accords de Matignon et de Nouméa.
Elles ne s’inscrivent pas dans le sens d’une
certaine politique coloniale qui a, jusqu’alors, prévalu dans ce Pays et que
vous vous acharnez à maintenir et à pérenniser.
Et puis, il
y a eu les élections législatives et les
campagnes électorales caractérisées, au sein de la droite, par les insultes,
les invectives identitaires, et vis à
vis du FLNKS, par la calomnie et le mensonge, ce qui a fait ressurgir chez certains
électeurs le spectre des vielles peurs et la crainte de l’exclusion, réactions
dont nous avons subi la traduction en termes haineux.
Ces mêmes types de propos qui, en 1988, ont
condamné la poignée de main entre Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur et
provoqué le refus, par une partie de vos partisans, des Accords de Matignon lors du référendum de
Novembre 1988.
C’est encore cette même campagne qu’aujourd’hui,
certains apprentis sorciers s’amusent à mener, en tentant de gagner un certain
électorat par, en particulier, la condamnation de la citoyenneté
calédonienne qu’ils dénaturent, alors qu’il
s’agit là d’un acquis fondamental pour le Peuple Calédonien.
Il y a là des relents d’une situation qui a été à
l’origine d’évènements que nul, dans ce pays apaisé, ne souhaite revivre.
Attention
que votre opportunisme politique qui veut que, peu importe la manière seul compte le résultat, ne nous mène trop
loin. La course au pouvoir ou au
maintien du pouvoir vient supplanter, chez vous, l’intelligence des femmes et
des hommes de ce pays et tant pis si certains se sentent trahis ou abandonnés
au bord du chemin de l’Histoire de leur propre Pays.
D’ailleurs, pour ceux qui avaient fait de ces
élections législatives, un référendum sur la levée des 2 drapeaux, le
résultat a, en effet, permis de
clarifier la situation : les scores cumulés des candidats du FLNKS et du
RUMP se sont établis à 52,5% des suffrages lors du 1er tour de ces
élections. Une majorité d’électeurs s’est donc ainsi exprimés favorablement à
la démarche de levée des 2 drapeaux sur les édifices publics. Seuls les camps
retranchés de Bourail et La Foa, refusent toujours ce résultat démocratique.
Une
nouvelle fois, vous vous êtes renfermés sur vous-même avec vos crispations, vos
doutes, et c’est ainsi que vous vous
installez, aujourd’hui, dans les faits, dans l’immobilisme et le statu quo en
attendant les échéances de 2014. Le partage du pouvoir, les politiques PAYS ?
remisés dans les placards, la mise en
œuvre de la TGA, premier pan de la réforme globale de la fiscalité ? reportée à après que vous ayez assuré pour les uns, gagné pour les autres, les postes du
Pouvoir, c’est-à-dire, après les élections municipales et provinciales de 2014.
Cela n’est pas la posture du FLNKS pour qui, la mise
en œuvre de l’Accord de Nouméa, la concrétisation du Destin Commun, demeurent
des fondamentaux qui transcendent les ambitions personnelles pour viser
l’intérêt général, l’intérêt du Pays, l’intérêt des citoyens calédoniens.
C’est ainsi que l’on a pu dire que l’Accord de Nouméa était
bloqué. Alors l’Etat-signataire, face à ses propres engagements pour la
décolonisation et l’émancipation du pays a, très rapidement, engagé les démarches
pour que se tienne un Comité des Signataires dont l’objectif serait de : « relancer les travaux nécessaires à
la bonne application de l’ADN dans son esprit et dans sa lettre ».
Le Comité des Signataires s’est tenue le 6 Décembre
sous la responsabilité du 1er ministre Jean-Marc AYRAULT qui a
déclaré, je le cite : « Aujourd’hui,
il est important que, dans le fonctionnement des institutions, les uns et les
autres veillent à préserver et faire vivre le sens du compromis et du consensus
indispensable à la gestion des affaires publiques et à la mise en œuvre des
échéances importantes sur lesquelles les calédoniens vous attendent dès
maintenant ».
Rattrapé par ses responsabilités et par le poids de
l’histoire, chacun a rangé, pendant ce Comité des Signataires, ses ambitions
personnelles pour faire valoir l’intérêt général du PAYS.
Les délégations se sont félicitées de l’esprit qui a
présidé à la tenue du Xème Comité des Signataires.
Mais à peine
rentrés au pays le premier acte politique qui nous échoit est : le dépôt,
par Calédonie Ensemble, d’une motion de censure contre le gouvernement. Ce
qui nous fait dire que certains veulent
faire croire qu’ils ressortent grandis de ce Comité des Signataires, mais dans
le même temps ils ne souhaitent pas que les Calédoniens puissent bénéficier des
décisions qui y ont été prises, et ils vont tout faire pour qu’elles ne soient pas mises en œuvre.
Plus
le doute persiste, plus les électeurs se rétractent et se raccrochent aux
discours démagogiques.
Nous sommes
en plein marketing politique. Nous sommes en pleine propagande électoraliste.
Par ailleurs, sachez aussi que nous ne sommes pas dupes de la démarche
qui tente de jouer la division au sein du camp indépendantiste en distribuant
des bons points à certains et en fustigeant les autres.
Ce
n’est pas la première fois et certainement pas la dernière que vous vous
permettez de juger les bons et les mauvais indépendantistes. C’est une vraie
culture chez vous.
Mais nos valeurs intrinsèques du consensus, de
solidarité, de respect, se nourrissent
de l’adversité et s’en trouvent confortés. Les débats sont présents au
sein du FLNKS, c’est comme cela et grâce à cette liberté d’opinions et
d’expression que nous avançons et que
nous aboutirons à notre objectif final, qui lui, ne souffre d’aucune contradiction,
la Souveraineté pleine et entière de ce Pays qui, pour le moment s’appelle
encore Nouvelle-Calédonie.
Le groupe FLNKS votera contre cette motion de censure.
Et, pour finir, nous invitons le groupe CALEDONIE
ENSEMBLE à mettre un terme à sa propagande politicienne et à traduire ses discours par des faits en prenant
vraiment la responsabilité de faire tomber le gouvernement puisque l’article
121 modifié de la Loi Organique le lui permet.
Merci