jeudi 27 décembre 2012



  Naku press publie ci-après la déclaration du Groupe FLNKS au congrès du pays lors du vote  de la motion de censure déposée par le groupe Calédonie Ensemble. Une motion de censure finalement rejetée , seuls 18 voix/54  ont voté pour , dont le Groupe Uni et Pascal NAOUNA de l'Union Calédonienne.

                                 
Groupe Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste
 




SEANCE PUBLIQUE
21 DECEMBRE 2012


Par Caroline Machoro-Reignier


Monsieur le Président du Congrès
Monsieur le Président du Gouvernement
Chers collègues
Mesdames, Messieurs

Il nous est demandé de nous exprimer sur une motion de censure déposée par le groupe CALEDONIE-ENSEMBLE visant à remettre en cause la responsabilité du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.

Il s’agit d’une procédure inédite, encore jamais utilisée dans le cadre du fonctionnement de nos institutions. C’est dire que nous avons à faire, ici, à des précurseurs en mal d’aventures et de nouveautés qui ont fait le choix de cette innovation après avoir usé la démarche de la démission à répétition.

Je ne reviendrai pas sur le contenu de cette motion de censure, au sujet de laquelle les uns et les autres viennent de s’exprimer.
Je n’en retiendrai que ceci :
-          « OUI, mille fois OUI », nous avons pris du retard sur le processus de décolonisation et d’émancipation qu’est l’Accord de Nouméa, 
-         « OUI, mille fois OUI », nous menons  une lutte de tous les instants et devons faire preuve d’une vigilance à toute épreuve pour éviter les  tentatives incessantes de dévoiement de cet Accord.
-         « OUI, mille fois OUI »,  c’est au quotidien que nous devons mener le combat pour son application dans son esprit et dans sa lettre.

Mais, tout ceci n’a rien de nouveau !

Et je le dis avec d’autant plus de force,  que dès la première mandature  de son entrée en vigueur, que l’on s’en souvienne, il nous a fallu nous mobiliser, nous les militants de l’UNION CALEDONIENNE,  nous les militants du FLNKS, nous les Indépendantistes, signataires, partenaires de l’Accord de Nouméa, pour  la mise en œuvre pleine et entière de ses dispositions.

Combien de recours nous a-t-il fallu intenter auprès du Tribunal Administratif, qui nous a, d’ailleurs, chaque fois, donné raison, pour obliger le Gouvernement  de l’époque à respecter la collégialité et le  contreseing. S’en est suivie sa chute en Novembre 2002 que nous avons perpétrée  pour sensibiliser la population sur les dérives organisées par votre coalition « loyaliste », c’est ainsi que vous vous qualifiiez alors, vous les non indépendantistes, pour remettre en cause  un Accord de Nouméa dont vous veniez de mesurer l’orientation irréversible vers la Souveraineté de notre Pays.

C’est la mobilisation, ce sont les manifestations lors de la venue du Président CHIRAC pour le respect de la parole donnée et pour  la mise en œuvre du corps électoral gelé qui consacre une citoyenneté propre à notre Pays,  citoyenneté qui doit, si nous devions en prendre la décidons, se traduire en nationalité à l’issue du processus.

Mais c’est aussi le sens du compromis et  de la démocratie que nous, nous avons accepté, quand vous, vous avez décidé de faire valoir votre majorité dite loyaliste, contre la minorité indépendantiste.

A aucun moment, ces combats pour le respect de la parole donnée n’ont empêché le fonctionnement normal des institutions.

A aucun moment nous n’avons refusé de siéger.

Et, lorsque vous avez décidé de nous exclure, de nous « purger », selon vos propres termes, des commissions internes  du congrès et des organismes extérieurs, nous avons continué à porter nos propres engagements pour faire vivre l’Accord de Nouméa.

A aucun moment nous ne nous sommes réfugiés dans la posture du pauvre CALIMERO.

Puis quand, après les élections législatives de 2007, la déchirure s’est opérée dans vos rangs pour cause de trahison et de vengeance, nous, les indépendantistes, conscients de la nécessaire représentation de tous les calédoniens au sein de la première institution du Pays, soucieux d’instaurer le débat d’idées entre partenaires d’un accord librement consenti pour la construction d’une Communauté de Destin, au nom de ces valeurs, nous vous avons cédé des postes au sein des commissions internes du Congres desquelles vous vous étiez vous-mêmes exclus.

Alors, à ceux qui, aujourd’hui, se plaignent de retards, qu’ont-ils fait en  Mars et Avril 2011 ? Et je ne remonterai pas plus loin dans le temps.
Des démissions à répétition et une véritable guerre de tranchée qui a porté préjudice à la marche normale de nos institutions et à l’exercice des responsabilités que nous nous devons vis-à-vis des gens qui nous placés ici pour veiller sur leurs intérêts.

L’objectif, personne ne s’y est jamais trompé, était alors et est, encore aujourd’hui, de bloquer les institutions pour que CALEDONIE ENSEMBLE retrouve une place de leadership au sein d’un pacte républicain « refondé ». Une prise d’otage de l’Accord de Nouméa dans le seul but de satisfaire une ambition  démesurée,  procédé qui n’a pris fin qu’avec la modification de la Loi Organique, ce qui n’est pas une opération anodine, quand même.

Pour notre part, nous continuons à revendiquer notre place dans la conduite des affaires de ce Pays, notre responsabilité dans la mise en œuvre de l’Accord de Nouméa, et c’est ainsi que nous nous sommes engagés dans un  gouvernement nouveau  respectueux  des idées portées par les élus du Congrès et pour la désignation d’un indépendantiste, Rock Wamytan,  à la présidence du Congrès. Il aura fallu 23 longues années après la poigné de mains de Jean-Marie TJIBAOU et Jacques LAFLEUR, un acte politique majeur à jamais gravé dans la mémoire calédonienne, pour qu’enfin se réalisent le partage et le rééquilibrage politique.

Des avancées aujourd’hui remises en cause.

L’état d’esprit que nous avons porté ces deux dernières années, l’ouverture dont nous avons fait preuve et que nous continuons de démontrer vis-à-vis de l’ensemble de nos partenaires non indépendantistes, nonobstant nos  différences, et sans chercher à amplifier, de manière sournoise, les écarts qui vous séparent, s’inscrivent en droite ligne de cette poignée de main.
Comment, autrement, réaliser nos engagements communs  pour l’émancipation de notre PAYS ?

La mise en place au Congrès, des commissions spéciales « Pour la Réforme Fiscale » et « Vie chère » pour l’élaboration et le suivi des accords économiques et sociaux s’inscrit dans ce schéma qui traduit notre volonté de faire converger nos points de vue pour parvenir à l’entente sur les dossiers fondamentaux de l’Accord de Nouméa, comme pour une meilleure efficacité à répondre aux préoccupations quotidiennes de nos concitoyens. Nos partenaires de la Société Civile partagent ces soucis et nous  soutiennent dans notre démarche.

La reprise des travaux sur le grand chantier du projet éducatif calédonien qui doit fonder le socle commun de l'enseignement de notre pays, qui doit intégrer la maîtrise d'une langue kanak au même titre que la langue française est une réalité bien que gênée par des problèmes de calendrier au sein même du Congrès.

C’est aussi, sous ce mode de gouvernance, que nous avons budgété, entre autres, le chantier du pôle sanitaire de Koné dont les travaux débuteront l’an prochain.

L’insertion de notre pays dans sa région a, dans ce contexte, connu un nouveau départ. La participation remarquée de la Nouvelle-Calédonie au Forum des Iles du Pacifique avec ce grand pas en faveur de la protection élargie de notre environnement marin, la présidence par la NC de la 23ème Conférence du PROE qui s’est déroulée en Septembre à Nouméa avec des visites sur sites à Goapain et l’Ile Ouen, la Convention de partenariat signée, cette année, entre la Nouvelle-Calédonie et la CPS, les accords interparlementaires initiés par le Président Wamytan entre le Congrès de la NC et les parlements du Vanuatu et de Fidji et, au delà de la Région Pacifique, avec l’Assemblée Nationale Française, la tenue à Nouméa, l’année prochaine du Sommet des Pays Mélanésiens du « Groupe Fer de Lance » qui verra le FLNKS en endosser la présidence, la concrétisation, dès 2013 de la représentation diplomatique de notre Pays à l’étranger. 

C’est aussi la finalisation du Schéma Nouvelle-Calédonie 2025, que le récent Comité des Signataires vient de confirmer comme étant le cadre logique des politiques publiques du Pays, notamment le Schéma Industriel et Minier.

C’est encore la mise en œuvre du Fonds de Garantie en faveur du développement sur terres coutumières,  la création des ZODEP pour une meilleure intégration de la « Brousse » et des « Broussards » dans le monde économique.

C’est aussi et, il était grand temps, le courage de s’attaquer au désenclavement terrestre, maritime et aérien des zones les plus reculées du Pays. 

En résumé, c’est un développement  social et économique  tournée vers la Calédonie profonde, bien au-delà de Nouméa et du Grand Nouméa. C’est le rayonnement politique de notre Pays dans la Région.

Ce ne sont là que quelques exemples d’opérations décidées et mises en œuvre dans ce contexte particulier de travail et de réflexion qui transcendent les politiques partisanes. C’est la concrétisation de politiques inscrites par le FLNKS dans les Accords de Matignon et de Nouméa.

Elles ne s’inscrivent pas dans le sens d’une certaine politique coloniale qui a, jusqu’alors, prévalu dans ce Pays et que vous vous acharnez à  maintenir et à pérenniser.

Et puis,  il y a eu les élections législatives et  les campagnes électorales caractérisées, au sein de la droite, par les insultes, les invectives identitaires,  et vis à vis du FLNKS, par la calomnie et le mensonge, ce qui a fait ressurgir chez certains électeurs le spectre des vielles peurs et la crainte de l’exclusion, réactions dont nous avons subi la traduction en termes haineux.

Ces mêmes types de propos qui, en 1988, ont condamné la poignée de main entre Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur et provoqué le refus, par une partie de vos partisans,  des Accords de Matignon lors du référendum de Novembre 1988.

C’est encore cette même campagne qu’aujourd’hui, certains apprentis sorciers s’amusent à mener, en tentant de gagner un certain électorat par, en particulier, la condamnation de la citoyenneté calédonienne  qu’ils dénaturent, alors qu’il s’agit là d’un acquis fondamental pour le Peuple Calédonien.

Il y a là des relents d’une situation qui a été à l’origine d’évènements que nul, dans ce pays apaisé, ne souhaite revivre.

 Attention que votre opportunisme politique qui veut que, peu importe la manière  seul compte le résultat, ne nous mène trop loin.  La course au pouvoir ou au maintien du pouvoir vient supplanter, chez vous, l’intelligence des femmes et des hommes de ce pays et tant pis si certains se sentent trahis ou abandonnés au bord du chemin de l’Histoire de leur propre Pays.

D’ailleurs, pour ceux qui avaient fait de ces élections législatives,  un  référendum sur la levée des 2 drapeaux, le résultat a,  en effet, permis de clarifier la situation : les scores cumulés des candidats du FLNKS et du RUMP se sont établis à 52,5% des suffrages lors du 1er tour de ces élections. Une majorité d’électeurs s’est donc ainsi exprimés favorablement à la démarche de levée des 2 drapeaux sur les édifices publics. Seuls les camps retranchés de Bourail et La Foa, refusent toujours ce résultat démocratique.
        
         Une nouvelle fois, vous vous êtes renfermés sur vous-même avec vos crispations, vos doutes, et c’est ainsi que vous  vous installez,  aujourd’hui, dans les faits,  dans l’immobilisme et le statu quo en attendant les échéances de 2014. Le partage du pouvoir, les politiques PAYS ?  remisés dans les placards, la mise en œuvre de la TGA, premier pan de la réforme globale de la fiscalité ? reportée  à après que vous ayez assuré pour  les uns, gagné pour les autres, les postes du Pouvoir, c’est-à-dire, après les élections municipales et provinciales de 2014.

Cela n’est pas la posture du FLNKS pour qui, la mise en œuvre de l’Accord de Nouméa, la concrétisation du Destin Commun, demeurent des fondamentaux qui transcendent les ambitions personnelles pour viser l’intérêt général, l’intérêt du Pays, l’intérêt des citoyens calédoniens.

C’est ainsi que l’on a pu dire que l’Accord de Nouméa était bloqué. Alors l’Etat-signataire, face à ses propres engagements pour la décolonisation et l’émancipation du pays a, très rapidement, engagé les démarches pour que se tienne un Comité des Signataires dont l’objectif serait de : « relancer les travaux nécessaires à la bonne application de l’ADN dans son esprit et dans sa lettre ».

Le Comité des Signataires s’est tenue le 6 Décembre sous la responsabilité du 1er ministre Jean-Marc AYRAULT qui a déclaré, je le cite : «  Aujourd’hui, il est important que, dans le fonctionnement des institutions, les uns et les autres veillent à préserver et faire vivre le sens du compromis et du consensus indispensable à la gestion des affaires publiques et à la mise en œuvre des échéances importantes sur lesquelles les calédoniens vous attendent dès maintenant ».

Rattrapé par ses responsabilités et par le poids de l’histoire, chacun a rangé, pendant ce Comité des Signataires, ses ambitions personnelles pour faire valoir l’intérêt général du PAYS.

Les délégations se sont félicitées de l’esprit qui a présidé à la tenue du Xème Comité des Signataires.

 Mais à peine rentrés au pays le premier acte politique qui nous échoit est : le dépôt, par Calédonie Ensemble, d’une motion de censure contre le gouvernement. Ce qui  nous fait dire que certains veulent faire croire qu’ils ressortent grandis de ce Comité des Signataires, mais dans le même temps ils ne souhaitent pas que les Calédoniens puissent bénéficier des décisions qui y ont été prises, et ils vont tout faire pour  qu’elles ne soient pas mises en œuvre.

Plus le doute persiste, plus les électeurs se rétractent et se raccrochent aux discours démagogiques.

Nous sommes en plein marketing politique. Nous sommes en pleine propagande électoraliste.

Par ailleurs, sachez aussi  que nous ne sommes pas dupes de la démarche qui tente de jouer la division au sein du camp indépendantiste en distribuant des bons points à certains et en fustigeant les autres.
Ce n’est pas la première fois et certainement pas la dernière que vous vous permettez de juger les bons et les mauvais indépendantistes. C’est une vraie culture chez vous.

Mais nos valeurs intrinsèques du consensus, de solidarité, de respect, se nourrissent  de l’adversité et s’en trouvent confortés. Les débats sont présents au sein du FLNKS, c’est comme cela et grâce à cette liberté d’opinions et d’expression  que nous avançons et que nous aboutirons à notre objectif final, qui lui, ne souffre d’aucune contradiction, la Souveraineté pleine et entière de ce Pays qui, pour le moment s’appelle encore Nouvelle-Calédonie.

Le groupe FLNKS votera contre cette motion de censure.

Et, pour finir, nous invitons le groupe CALEDONIE ENSEMBLE à mettre un terme à sa propagande politicienne et à  traduire ses discours par des faits en prenant vraiment la responsabilité de faire tomber le gouvernement puisque l’article 121 modifié de la Loi Organique le lui permet.

Merci