mercredi 13 avril 2011

La grande et longue intervention d'Alain Christnacht lors du colloque sur "Destin des collectivités politiques d'Océanie"

"Je garde confiance dans la capacité des Calédoniens à assumer une société pluriethnique viable parce que la situation du peuple d’origine aura été pleinement acceptée. " C'est par cette dernière phrase qu'Alain Christnacht a conclu sa grande et longue intervention à ce colloque qui a lieu à Nouméa du 7 au 10 mars 2011 ... "Le Professeur Faberon a pris des risques en me proposant de parler devant vous des perspectives institutionnelles de la Nouvelle-Calédonie. J’en prends aussi. La réponse est attendue dans plusieurs années. Tout un processus de discussion collective a été défini pour y répondre. Ma légitimité à m’aventurer seul sur ce terrain délicat est douteuse. Je ne suis habilité ni par le gouvernement, ni par une force politique, ni par une institution. Si j’ai accepté cette proposition amicale, c’est précisément parce que, en un sens, je suis irresponsable. Je ne représente pas le Conseil d'Etat et ce n’est que pour ne pas souligner la faiblesse de mes titres universitaires, au milieu de tant de docteurs et d’agrégés, que les organisateurs ont mentionné ma qualité de membre. Ce que je vais dire n’engage que moi. Ce n’est pas non plus en tant que praticien du droit public français que je vais m’exprimer. Je traiterai de questions juridiques mais ma perspective ne sera pas principalement juridique. Après tant d’interventions précieuses de spécialistes de plusieurs disciplines, mon intervention ne s’inscrit dans aucune précisément, ce qui me fait courir le double risque de l’amateurisme et de l’incursion sur le champ politique, alors que je ne suis pas élu. Je me présente devant vous comme un expert en Calédonie, depuis 30 ans maintenant que j’observe avec passion les efforts émouvants des hommes et de femmes de ce pays pour résoudre leurs contradictions et leurs conflits. Aux élus de la Nouvelle-Calédonie, je veux dire que je respecte leurs choix et leurs engagements et reconnais leur lourde responsabilité, beaucoup plus grande que celle de leurs homologues métropolitains dans cette longue gestation d’une Nouvelle-Calédonie différente. Je ne cherche pas à rivaliser avec eux mais à participer à ma place à la réflexion commune. Je vais tenter de tracer des perspectives institutionnelles pour la Nouvelle-Calédonie, c'est-à-dire, ouvrir des pistes, indiquer quelles sont les solutions dont je crois qu’elles mériteraient d’être explorées plus particulièrement. Nous avons eu un aperçu passionnant pendant ces quatre journées de l’imagination mise en œuvre pour organiser la gouvernance de collectivités politiques particulières marquées notamment par leur petite taille ou la diversité de leur population. Mais il ne s’agit pas pour la Nouvelle-Calédonie de faire son marché d’innovations institutionnelles pratiquées ailleurs mais de trouver une solution adaptée à sa situation particulière. Elle n’est pas singulière au point qu’aucune autre expérience humaine ne pourrait l’éclairer. Elle a cependant besoin d’institutions sur mesure. C’est pourquoi, surtout au début de cette nouvelle phase d’invention d’un destin commun, il est essentiel de bien poser les questions pour lesquelles on cherche une réponse. J’en vois principalement six : deux questions préalables de méthode et quatre questions sur l’organisation à rechercher. 1) Peut-on trouver une solution institutionnelle pour la Nouvelle-Calédonie et pour quelle durée doit-elle être prévue ? 2) Comment et quand les citoyens de Nouvelle-Calédonie doivent-ils être informés de la ou des solutions proposées et choisir ? 3) Qui doit être citoyen de ce pays, c'est-à-dire disposer de la pleine capacité d’agir dans la vie politique, économique et sociale ? Doit-il y avoir une catégorie de citoyens ou plusieurs ? 4) Dans la nouvelle organisation institutionnelle, au nom de qui la justice sera-t-elle rendue et par qui la force publique sera-t-elle commandée ? Plus généralement, quelles compétences l’Etat français conservera-t-il ? 5) Dans la communauté des nations, quelle doit être la place de la Nouvelle-Calédonie de demain ? A quels ensembles doit-elle appartenir ? Quelles alliances doit-elle nouer ? 6) Comment organiser les institutions après la consultation et comment qualifier cette organisation ? 1. Peut-on trouver une solution institutionnelle pour la Nouvelle-Calédonie et pour quelle durée doit-elle être prévue ? Il y a des problèmes scientifiques ou humains qui n’ont pas de solution, au moins à l’échelle d’une ou plusieurs générations. On la cherche mais on ne peut la trouver, faute d’outils, de volonté ou de circonstances favorables. Au mieux, on va de solution provisoire en solution provisoire. Pour la Nouvelle-Calédonie, par deux fois, des solutions ont été trouvées. D’où l’on venait, c’était presque miraculeux mais ces solutions sont partielles et provisoires. Avec le recul, les accords de Matignon et de Nouméa n’auront-ils été que des armistices ou auront-ils été annonciateurs de la fondation d’une entité calédonienne dans laquelle les populations auront conclu un nouveau contrat social durable dans une relation nouvelle avec la France européenne ? Il est trop tôt pour le dire. L’histoire hésite encore. Tout est réuni pour que la Nouvelle-Calédonie soit durablement une terre de conflits : l’histoire, avec ses héros et ses victimes, qui appellent leurs descendants à ne pas les trahir ; l’existence de deux légitimités profondément différentes dans leur nature ; la dissymétrie des peurs et des espoirs. Deux peuples pour une terre, c’est une histoire connue, même s’il y a en Nouvelle-Calédonie plus que deux peuples et si la terre est vaste. Les Accords de Matignon ont été conclus dans l’urgence. La peur d’un affrontement meurtrier a aidé à l’entente. Et celle-ci s’est faite sur le report de la question cruciale : celle des rapports avec la France. On s’est entendu sur presque tout, sauf sur l’essentiel, question reportée à dix ans. C’était déjà bien de pouvoir mettre de côté la question qui fâchait. L’Accord de Nouméa a rouvert l’horizon. Le mur approchait. L’accord l’a reculé, et de deux fois la durée. Encore une fois, la réponse à la question à l’origine des conflits a été repoussée, deux fois plus loin. Cette fois, l’échéance était dans un autre siècle, au sens propre et au sens figuré. Jacques Lafleur avait proposé trente ans et le FLNKS dix ans. La durée de vie de l’accord a donc été fixée entre la moitié de celle proposée par Jacques Lafleur et la différence entre cette dernière durée et celle proposée par le FLNKS. On a donc répondu à la question du vivre-ensemble dans une phase transitoire. En ce sens, la réponse à la première partie de la question que je pose ne peut qu’être positive. Il faut tout faire pour trouver à nouveau une organisation politique, une fois celle-ci venue à échéance. Compte tenu du risque de crise, voire de violences, il est impératif d’éviter toute solution de continuité. Est-il pour autant réaliste de chercher à répondre à la question esquivée par deux fois déjà de la nature des rapports entre la Nouvelle-Calédonie et la France ? Pourquoi ne pas reprendre la formule déjà été utilisée deux fois, avec succès ? C'est-à-dire prolonger l’accord de dix, vingt ou trente ans, avec des aménagements ? Ou encore en inventer un autre, qui soit lui aussi provisoire, même si ce doit être pour un tiers ou la moitié d’un siècle. L’objectif me semble devoir être de trouver une solution définitive. D’abord parce qu’un provisoire périodiquement répété prend des allures de définitif. Ne pas répondre à la question éludée finit par apparaître comme un procédé dilatoire équivalant en réalité à y apporter une réponse, implicite. Le renouvellement de solutions provisoires est aussi créateur d’incertitudes et de stress. A l’approche de l’échéance, les boussoles politiques s’affolent et les investisseurs prennent peur. Il y aussi une nécessité politique et morale. Une première fois, le peuple français, dans un référendum national, en 1988, a adopté le principe et la date d’une consultation sur une solution stable. C’est une nouvelle solution provisoire qui a été permise par le constituant national, puis adoptée par le corps électoral calédonien, dans un référendum local, dix ans plus tard. C’était juridiquement possible puisque la loi adoptée par un référendum national peut être modifiée comme les autres sans recourir à la même procédure et c’était pleinement défendable sur un plan démocratique : le peuple français avait approuvé un accord. Il y en avait un autre. Par le même raisonnement, on peut soutenir que ce que le constituant a fait pour permettre, dans l’Accord de Nouméa, une solution définitive à terme, il pourra le défaire pour permettre à un autre accord local, qui organiserait, à l’issue de l’Accord de Nouméa, une nouvelle solution provisoire, de s’appliquer. Il est clair que des engagements pris pour une durée de vingt ans peuvent se poser en termes nouveaux une fois ce délai écoulé. Ne pas les tenir n’est donc pas nécessairement les trahir. On voit tout de même que la répétition de la remise en cause des engagements même en accord avec ceux qui les ont pris finit par poser un problème. Par solution définitive, je n’entends pas solution immuable. Rien n’est jamais définitif. Il faudra prévoir des modalités de changement, comme pour tout système institutionnel. On peut même imaginer que certaines modalités auraient un terme fixé, disparaissant à une date convenue. Du moins, la solution soumise au vote des électeurs de Nouvelle-Calédonie serait-elle définie sans limitation de temps. 2) Comment et quand les citoyens de Nouvelle-Calédonie doivent-ils être informés de la ou des solutions proposées et choisir ? Sur la date de la consultation : Il n’y a aucune obligation de se déterminer en 2014. L’Accord de Nouméa a été signé pour vingt ans. C’est ce que dit le préambule : « Cette solution définit pour vingt ans l’organisation politique de la Nouvelle-Calédonie et les modalités de son émancipation. ». Et plus loin : « Au terme d’une période de vingt ans, (…) » L’Accord de Nouméa, et donc la Constitution – puisque, il ne faut jamais l’oublier, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 15 mars 1999 sur la loi organique sur la Nouvelle-Calédonie a jugé, dans son considérant 3, que les orientations définies par l’Accord de Nouméa ont valeur constitutionnelle - ont prévu que la consultation sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie aurait lieu au cours du quatrième mandat de cinq ans du congrès, dit le document d’orientation de l’accord, « au cours du mandat du congrès qui commence en 2014 » reprend l’article 217 de la loi organique du 19 mars 1999. La consultation peut avoir lieu dès 2014, si une majorité des 3/5 des membres du congrès en décide ainsi. Mais il s’agirait là d’une anticipation de la fin de l’accord, certes autorisée mais en rien obligatoire. Puisque l’accord dure vingt ans, c’est en 2018 que, normalement, la consultation est organisée ou, si l’on préfère entre 2014 et 2018. Quelle est la date la plus tardive pour organiser la consultation ? Le même article prévoit que : « Si, à l'expiration de l'avant-dernière année du mandat du congrès commençant en 2014, celui-ci n'a pas fixé la date de la consultation », c’est l’Etat qui décide de l’organiser. Pour le congrès commençant en 2014 et finissant donc son mandat en 2019, ce serait en 2018. Le congrès élu normalement en 2014 ne sera pas nécessairement le dernier de l’Accord de Nouméa. Ce ne sont pas en effet une consultation mais trois qui sont prévues par l’accord. Je reviendrai sur cette bizarrerie dans laquelle, entre autres malignités, le Pr Gohin voit un signe du caractère diabolique de l’Accord de Nouméa. Restons-en pour le moment aux dates des scrutins. L'article 217 de la loi organique prévoit que : « Si la majorité des suffrages exprimés conclut au rejet de l'accession à la pleine souveraineté, une deuxième consultation sur la même question peut être organisée à la demande écrite du tiers des membres du congrès, adressée au haut-commissaire et déposée à partir du sixième mois suivant le scrutin. La nouvelle consultation a lieu dans les dix-huit mois suivant la saisine du haut-commissaire à une date fixée dans les conditions prévues au II de l'article 216. » Par conséquent, à partir de la date du premier scrutin, il faut entre six mois et deux ans, pour organiser le deuxième scrutin. L’accord de Nouméa prévoit que si la réponse à la deuxième question est encore négative sur l’accès à la pleine souveraineté, une nouvelle consultation est organisée (sur demande d’un tiers des membres du congrès) et que si la réponse est pour la troisième fois négative, « les partenaires politiques se réuniront pour examiner la situation ainsi créée ». Or l'article 217, dans sa version soumise au Conseil constitutionnel, ne prévoyait que deux consultations, puisque la réunion du comité des signataires était prévue après la seconde. Dans sa décision du 15 mars 1999 sur la loi organique, le Conseil constitutionnel a, d’une part, relevé que le « peut être organisé » devait s’entendre comme un « doit être organisé », d’autre part, que l’alinéa qui prévoyait que le comité des signataires se réunissait après la seconde consultation négative était contraire à la Constitution, puisque l’Accord de Nouméa prévoyait que c’était après la troisième. Cet alinéa a donc été supprimé mais pas remplacé. Il faut donc considérer que le mécanisme du document d’orientation s’applique directement, sans que l'article 217 le reprenne sur ce point : il y a bien trois consultations avant la réunion du comité des signataires. Par conséquent, il faut encore prévoir, le cas échéant, entre six mois et deux ans pour le troisième scrutin, soit pour le second et le troisième ensemble, jusqu’à cinq ans, au maximum, soit la durée d’un mandat du congrès. Les scrutins pouvant être organisés jusqu’en 2023, il faudrait donc élire un nouveau congrès en 2019. On imagine les difficultés politiques de ces exercices, avec des élections au milieu de consultations réitérées mais c’est ce qui est écrit. Des consultations sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie peuvent être organisées entre 2014 et 2023. Il faut bien sûr espérer qu’on n’attendra pas jusqu’à cette dernière date pour trouver une solution. Sur la question posée : Une question est prévue. L'article 216 de la loi organique prévoit que : « Les électeurs sont convoqués par décret en conseil des ministres, après consultation du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie. Le décret fixe le texte de la question posée et les modalités d'organisation du scrutin. » La question sera donc fixée par décret. C’était aussi le cas pour la consultation sur l’Accord de Nouméa, prévue par l'article 76 de la Constitution. En revanche le référendum du 13 septembre 1987, fondé sur l'article 53 de la Constitution, avait été organisé par la loi. Le décret pourra naturellement être contesté devant le Conseil d'Etat, comme la régularité de cette consultation, en vertu de l'article 220 de la loi organique. Le Conseil d'Etat, s’il est saisi, vérifiera que la question posée est conforme à la loi organique et à la Constitution, c'est-à-dire à l’Accord de Nouméa. L'article 216 de la loi organique dispose que la consultation porte sur « l’accès à la pleine souveraineté », reprenant ainsi la formule de l'article 77 de la Constitution Les deux derniers alinéas du préambule de l’Accord de Nouméa définissent clairement ce qu’il faut entendre par accession à la pleine souveraineté. « Au terme d’une période de vingt années, le transfert à la Nouvelle-Calédonie des compétences régaliennes, l’accès à un statut international de pleine responsabilité et l’organisation de la citoyenneté en nationalité seront proposées au vote des populations intéressées. / Leur approbation équivaudrait à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie. » Consulter sur l’accession à la pleine souveraineté implique donc de proposer les trois évolutions et pas, à la carte, une ou deux parmi les trois. Et si le document d’orientation (point 5) mentionne que la consultation porte sur ces trois évolutions et note que si la réponse « à ces propositions » est négative, il n’y a pas de doute qu’il s’agit bien des trois nécessairement posées ensemble. L’Accord de Nouméa mentionne l’accession à la pleine souveraineté et non « l’indépendance », à la différence de l'article 2 de la loi du 9 novembre 1988 portant dispositions statutaires et préparatoires à l’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie en 1988, approuvée par le référendum national du 7 novembre, qui indiquait que, entre le 1er mars et le 31 décembre 1988, « les populations intéressées de la Nouvelle-Calédonie seront appelées à se prononcer … sur le maintien du territoire dans la République ou sur son accession à l’indépendance », question qui, comme on le sait, ne fut jamais posée, mais fut remplacée, sur le fondement de l'article 76 de la Constitution qui a « écrasé » cette disposition législative, par un référendum sur l’Accord de Nouméa, tout en maintenant le corps électoral admis à se prononcer. Il est vrai que la loi du 9 novembre 1988 ayant prévu cette consultation sur le fondement de l'article 53 de la Constitution qui oblige à une consultation de la population intéressée avant la « cession » d’un territoire, le choix ne pouvait être posé autrement. Sur le fondement de l’Accord de Nouméa constitutionnalisé, il était possible de prévoir d’autres questions. Mais c’est la même question qu’en 1988 que l’accord politique a retenue, sous une autre forme, non par une sorte de « pudeur » à l’égard des partisans du maintien dans la République mais pour montrer une forme de continuité possible, certes pas inévitable, entre l’Accord de Nouméa, transfert de compétences jusqu’aux régaliennes, citoyenneté, compétence partagée en matière de relations internationales et l’une de ses issues possibles. Une autre différence avec les Accords de Matignon, on l’a dit, est qu’il y a dissymétrie entre les procédures d’adoption des deux solutions présentées au corps électoral. Pour l’accession à la pleine souveraineté, un vote suffit. Pour rester dans la République, il en faut trois, et encore, après trois refus d’en sortir, les signataires de l’Accord de Nouméa se réunissent pour déterminer ce que l’on fait. J’entends que c’est singulier. L’Accord de Nouméa ne pouvait être la simple prolongation des Accords de Matignon. En 1988, les signataires indépendantistes avaient donné leur accord pour une consultation en 1998 parce qu’ils espéraient que dans ce délai, ils convaincraient suffisamment d’électeurs non indépendantistes des mérites d’une solution d’indépendance pour obtenir la majorité du corps électoral défini. La consultation a été reportée à vingt ans dans le même espoir. C’est pour crédibiliser cette issue qu’il a été prévu de poser la question trois fois, dans une logique d’appel : vraiment vous ne nous faites pas confiance assez pour partir dans l’aventure de la pleine souveraineté avec nous ? D’où sans doute, cette étrange répétition ternaire, qui fait penser au reniement de Saint Pierre ou à des engagements philosophiques ? Cette disposition a été acceptée par les deux autres partenaires. Peut-on poser une autre question ? La consultation, telle qu’elle est prévue, doit offrir le choix entre l’accession à la pleine souveraineté et la non-accession, c'est-à-dire le maintien dans la République. Peut-on à nouveau écarter de la question la solution de l’accession à la pleine souveraineté ? Et si on ne l’écarte pas, l’éclairer par un aperçu sur ce qui se passerait, selon l’expression de l’un des intervenants, « le jour d’après » ? Il s’agirait par exemple de proposer des modalités de maintien dans la République, avec une nouvelle évolution jusqu’aux « confins de l’autonomie » dans le premier cas, ou bien des principes d’un accord d’association ou de coopération, pour une pleine souveraineté, juste de l’autre côté de la frontière. Est-il politiquement possible de poser une autre question ? L’Accord de Nouméa a fait obstacle à l’application de la disposition des Accords de Matignon sur la consultation finale. Dès lors que les partenaires qui avaient signé ces derniers l’avaient admis par le premier, il n’y avait rien à y redire au plan des principes démocratiques. Le même raisonnement vaudrait pour un nouvel accord entre tous les partenaires. Le pouvoir constituant, dont l’exercice suppose, le plus souvent, un accord entre la majorité et l’opposition, serait certainement très vigilant sur ce point puisque, une nouvelle fois, pour la Nouvelle-Calédonie, une disposition essentielle de l’accord solennellement ratifié ne serait pas appliquée. Il faut bien voir que la modification de la question n’a pas le même sens selon que l’on s’oriente vers un accord pour une solution dans la République ou de pleine souveraineté éventuellement avec la République. Dans le premier cas, il s’agit, une nouvelle fois, de ne pas poser une question binaire pour ne pas se trouver dans la situation d’un rejet de la pleine souveraineté qui reposerait la question de la légitimité du corps électoral qui l’a prise. Dans le second cas, il s’agirait de crédibiliser les garanties d’une solution de pleine souveraineté de manière que puisse y adhérer un grand nombre de non indépendantistes. A vrai dire, dans ce dernier cas, comme on va le voir, il s’agit moins de ne pas poser la question prévue que d’éclairer ce terme du choix. Est-il juridiquement possible de poser une autre question ? Le Conseil constitutionnel a indiqué dans sa décision du 2 juin 1987 sur la loi organisant la consultation de septembre 1987 en Nouvelle-Calédonie : « La question posée doit satisfaire à la double exigence de loyauté et de clarté de la consultation ; … s’il est loisible aux pouvoirs publics, dans le cadre de leurs compétences, d’indiquer aux populations intéressées les orientations envisagées, la question posée aux votants ne doit pas comporter d’équivoque, notamment en ce qui concerne la portée de ces indications. » Or le Conseil constitutionnel constatait que la loi qui lui était soumise comportait une question qui « porte non seulement sur le choix en faveur de l’accession de ce territoire à l’indépendance ou de son maintien au sein la République, mais également, dans cette dernière éventualité, sur un statut dont les éléments essentiels auraient été portés à la connaissance des intéressés. » Le Conseil constitutionnel a estimé que cette rédaction était équivoque car elle pouvait faire naître l’idée erronée que les éléments du statut seraient fixés alors qu’il appartiendrait à la loi de le faire. Il a donc déclaré ces précisions contraires à la Constitution. Comme l’a montré l’adoption de l’Accord de Nouméa, ces objections ne valent pas pour une question portant sur l’organisation institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie dans la République si la question et l’organisation sont prévues dans la Constitution. L'article 76 avait prévu que les populations de la Nouvelle-Calédonie se prononceraient sur les dispositions de l’Accord de Nouméa qui donnaient les grandes lignes de cette organisation. Il n’y avait donc atteinte à aucune disposition ni à aucun principe de valeur constitutionnelle dès lors que la Constitution elle-même le prévoyait. Si l’on veut poser une autre question finale que celle prévue par l’Accord de Nouméa, il faut d’abord modifier la Constitution, comme on l’a fait en 1998 et donc que le congrès national votre un loi de révision (sauf à imaginer un nouveau référendum national). Le pouvoir constituant, qui avait approuvé l’Accord de Nouméa, puis modifié l'article 77 de la Constitution pour affirmer une interprétation du glissement du corps électoral contraire à l’interprétation qu’en avait donné le Conseil constitutionnel, approuverait un nouvel accord, dont la première disposition consisterait à poser une autre question que celle prévue par l’Accord de Nouméa. Le raisonnement vaut-il pour une solution d’accession à la pleine souveraineté ? Il s’agirait alors de dire que l’accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie serait proposée aux électeurs dans des conditions précisées, pouvant aller par exemple jusqu’à la loi fondamentale future de la Nouvelle-Calédonie et les principes des accords d’association ou de coopération avec la France. La Constitution pourrait l’affirmer puisque le pouvoir constituant ne subit lui-même aucun contrôle. Cependant, serait certainement soulignée dans le débat politique qui accompagnerait une telle consultation, la contradiction fondamentale entre l’engagement pris par le constituant français et la liberté du nouvel Etat d’adopter les dispositions proposées et de conclure les accords présentés. On ne peut stipuler pour autrui. Par conséquent, la présentation de l’organisation de la Nouvelle-Calédonie exerçant la pleine souveraineté et des projets d’accord à conclure avec la République française devrait être celle d’un double engagement politique et non d’un engagement juridique. En revanche, rien d’interdirait au pouvoir constituant français de prévoir dans la Constitution des principes d’association et de coopération nouveaux, éventuellement pour la seule Nouvelle-Calédonie, qui ne seraient mis en œuvre que si les instances calédoniennes souveraines les adoptaient. On aurait ainsi l’accrochage dans la Constitution française des futurs accords, ce qui crédibiliserait ainsi grandement la démarche. Concluons qu’une nouvelle organisation dans la République pourrait être proposée, sans poser la question prévue, après révision constitutionnelle. S’il s’agissait de prévoir les modalités d’exercice de la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie, le constituant français pourrait prévoir des liens avec la France, mais sous réserve d’un accord de la Nouvelle-Calédonie souveraine. En tout cas, aujourd'hui, compte tenu de la disposition de l’Accord de Nouméa prévoyant trois consultations pour écarter l’option de la pleine souveraineté il me peu probable que l’on trouve un accord pour ne pas poser la question prévue pour retenir une nouvelle solution dans la République. La logique de la position indépendantiste est de rechercher un accord sur une solution de pleine souveraineté. Sinon, il sera difficile de ne pas poser la question prévue. 3) Qui doit être citoyen de ce pays, c'est-à-dire disposer de la pleine capacité d’agir dans la vie politique, économique et sociale ? Doit-il y avoir une catégorie de citoyens ou plusieurs ? Depuis vingt- cinq ans, on tourne de la question du corps électoral, c'est-à-dire de celle de la citoyenneté. Comme François Garde l’a bien montré, ce n’est pas nouveau. Jadis, les indigènes et la population pénale n’avaient pas le droit de vote. Puis, on a donné le droit de vote aux indigènes, d’abord à certaines catégories, puis à tous. A partir de 1984, on se demande qui peut voter pour l’autodétermination, c'est-à-dire quelles sont les populations intéressées au sens de l'article 53 de la Constitution ? Personne ne conteste qu’un Français inscrit sur les listes électorales après six mois ne soit pas légitime à se prononcer sur l’avenir d’un pays où il passe. Comment, en revanche, déterminer si la bonne durée est trois ans, dix ans, ou vingt ans ? Les Accords de Matignon ont étendu la question aux élections aux institutions locales, dans la mesure notamment où la politique que celles-ci appliquent a des incidences sur la problématique de cette consultation sur le destin. Cette restriction n’a pu être appliquée faute que la révision constitutionnelle, qui était nécessaire pour la permettre, fût politiquement possible. La disposition a donc été reprise dans l’Accord de Nouméa, avec cette difficulté tranchée par la révision constitutionnelle de février 2007, de savoir quelle serait la situation des personnes arrivées après la conclusion de cet accord. La question calédonienne est plus celle des rapports entre les communautés que celle des rapports avec la France. Elles sont certes liées mais la première, sans doute la plus difficile, demeure posée dans tous les types de rapport avec la France. C’est pour cela qu’il faut être attentif aux problèmes de Fidji, dont l’exemple est certainement plus à méditer pour bien baliser l’avenir de la Nouvelle-Calédonie que celui des îles Cook. Les peuples autochtones ont des droits reconnus internationalement, notamment par la Déclaration des Nations Unies du 13 septembre 2007. Le droit international prévoit aussi un droit des pays et peuples colonisés à l’indépendance. Il ne se déduit pas de ces deux droits que les peuples autochtones ont seuls le droit de citoyenneté dans une société politique ayant accédé à l’indépendance. Ainsi, en Amérique, du Nord et du Sud, en Australie ou en Nouvelle-Zélande, ce ne sont pas les peuples autochtones qui sont démographiquement majoritaires. Ils n’exercent donc pas seuls les droits politiques. Pour autant, le principe d’égalité à la française, dans sa version jacobine, bien analysée encore récemment par Mona Ozouf dans son livre Composition française, dans lequel les hommes sont non seulement égaux mais semblables au point de ne pouvoir légitimement appartenir à aucune communauté sociale autre que celle de l’Etat, à supposer qu’elle soit applicable quelque part avec succès, est en tout cas radicalement inapplicable à la Nouvelle-Calédonie. Je crois aussi sans espoir le débat sur la supériorité théorique des droits de l’Homme sur les droits du peuple autochtone. Il faut concilier ces droits. Ce qui signifie qu’il est juridiquement autant que politiquement nécessaire de reconnaître les droits particuliers du peuple kanak, peuple et droits que la Constitution française reconnaît par l’Accord de Nouméa. Cela signifie aussi qu’il faut définir le périmètre de la citoyenneté et son évolution. Sauf à souhaiter un bouleversement complet des équilibres démographiques par un retour en arrière bien problématique, il faudra prioritairement organiser la citoyenneté de Nouvelle-Calédonie que celle-ci accède ou non à la pleine souveraineté. L’Accord de Nouméa ne peut juridiquement être seulement prolongé. La CEDH n’a accepté la version précédente du corps électoral que parce que la situation de la Nouvelle-Calédonie avait été troublée et parce que ce régime était temporaire. Des nationaux ne peuvent durablement être privés d’un droit de vote local alors même que l’on s’interroge parfois sur le droit de vote des étrangers aux élections locales. On doit donc déterminer qui est citoyen et dans quelle condition on peut accéder à cette citoyenneté. Ce sera un des points les plus délicats des discussions puisque ces conditions déterminent, dans la collectivité de la République comme dans un Etat souverain, qui détient le pouvoir démocratique. Compte tenu de l’histoire et de la situation de la Nouvelle-Calédonie, la maîtrise de l’immigration, partout nécessaire, se pose en termes particuliers puisqu’elle est le fait principalement de personnes de nationalité française. Si la Nouvelle-Calédonie ne peut se fermer à tout apport extérieur, elle ne peut ni économiquement ni politiquement être ouverte à tous vents. Il est inutile de cacher que derrière cette question est celle de la proportion des Kanak dans la population. Aucune solution qui n’offrirait pas des garanties que cette proportion ne diminuera pas encore par suite de l’immigration économique ne pourra faire l’objet d’un accord. Et rééquilibrer cette proportion uniquement par des restrictions de droit est à terme périlleux car portant en germe le double collège ou le partage communautaire des rôles comme au Liban, qui présente de sérieux inconvénients. Il ne faut pas se cacher que cette question pose de redoutables problèmes en droit français et européen. L’autre aspect de la citoyenneté est bien sûr celui du résultat de la consultation. Comme on l’a dit, il y a deux légitimités. Additionner les suffrages issus de ces deux légitimités pour en déduire une majorité a donc une signification politique limitée. Une majorité qualifiée est politiquement nécessaire pour choisir un destin viable. Comme c’est la majorité simple qui a été prévue, un accord est souhaitable, qui parvient au même résultat par d’autres voies. 4) Dans la nouvelle organisation institutionnelle, au nom de qui la justice sera-t-elle rendue et par qui la force publique sera-t-elle commandée ? Plus généralement, quelles compétences l’Etat français conservera-t-il ? J’ai commencé par la citoyenneté parce que ce sera le plus difficile. Après le lumineux exposé que nous venons d’entendre sur les «régaliennes », je peux plus facilement rentrer dans le vif du sujet. L’Accord de Nouméa a volontairement prévu d’aller très loin dans le partage des compétences pour clarifier le choix final. Tout au long du colloque, nous avons vu que des petits Etats indépendants voyaient souvent leur défense ou leurs relations diplomatiques assurées par une plus grande puissance. D’ailleurs, il arrive que même des plus grandes puissances partagent ou délèguent certaines compétences régaliennes à des organisations internationales. Rappelons que la France n’a plus la maîtrise de sa monnaie, compétence régalienne s’il en fut, ni totalement celle de la défense puisque, certes à côté de la dissuasion nucléaire, il y a intégration dans le commandement de l’OTAN. Je ne vois donc aucune difficulté théorique à trouver un accord, dans la République ou dans une situation de pleine souveraineté, pour faire évoluer le partage des compétences sur les relations extérieures et pour que la défense de la Nouvelle-Calédonie continue d’être exercée par l’armée française. Je voudrais prendre d’autres exemples, plus difficiles dans les discussions à venir. Au nom de qui la justice sera-t-elle rendue ? Les jugements des tribunaux en France sont rendus au nom du peuple français. Dans la République, il paraît difficile qu’ils ne le restent pas. Dans une solution de pleine souveraineté, ils devraient l’être au nom du peuple calédonien, ou de la nation calédonienne. Autant on peut concevoir que la justice d’un pays ayant accédé à la souveraineté soit assurée avec une organisation judiciaire inchangée, autant la référence au peuple paraît clivante. Une autre question qui montre bien les limites est celle du droit applicable. Le droit civil et commercial aura été transféré, c'est-à-dire que la Nouvelle-Calédonie pourra modifier le droit existant. Qu’en sera-t-il du droit pénal ? Quelle sera la place du droit coutumier, en matière civile et pénale ? Si la Nouvelle-Calédonie reste une collectivité, l’organisation judiciaire peut rester la même, sous réserve d’adaptation. Dans une solution de pleine souveraineté, il ne semble pas inconcevable que les tribunaux de Nouvelle-Calédonie soient placés sous le contrôle de cassation des cours suprêmes française, Conseil d'Etat et Cour de cassation, voire Conseil constitutionnel. Dans plusieurs pays du Commonwealth subsiste un contrôle du privy council britannique sur les cours supérieures nationales pour établir dans des pays de common law, l’unité de la jurisprudence. Se poserait aussi en cas d’accession à la pleine souveraineté, la question des conventions internationales applicables. La Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n’aurait sans doute plus vocation à s’appliquer pour des raisons géographiques. La Nouvelle-Calédonie pourrait cependant en reprendre les principes. Qui assure l’ordre public et commande la force publique ? Dans le maintien dans la République, cette fonction peut revenir au représentant de la France, sous réserve de l’information déjà prévue par le statut. Un transfert de compétence est cependant possible. Rappelons que dans de nombreux pays, la police dépend d’autorités élues, sous réserve des compétences de l’autorité judiciaire. Qui détermine l’organisation institutionnelle ? Cette question est également intéressante. Dans le régime actuel, sur la base de l’Accord de Nouméa, la loi organique définir les compétences des institutions de la Nouvelle-Calédonie et le rôle des communes, collectivités d’Etat, du moins tant que leur transfert n’aura pas été demandé. Dans une solution de maintien dans la République, sur un modèle fédéral accentué, il est tout à fait concevable que, sur la base de quelques principes posés au niveau national, l’essentiel de l’organisation institutionnelle, y compris l’organisation des communes, si elles étaient maintenues, soit fixé par le congrès de la Nouvelle-Calédonie. La loi organique nationale diminuerait sensiblement de volume. Il y a donc une frontière sur les régaliennes, plus nette sur ce que j’appellerai les régaliennes internes que les régaliennes externes, défense et affaires étrangères. 5) Dans la communauté des nations, quelle doit être la place de la Nouvelle-Calédonie de demain ? A quels ensembles doit-elle appartenir ? Quelles alliances doit-elle nouer ? Je serai plus bref. La Nouvelle-Calédonie a des compétences internationales. Comme rapporteur à la Section des finances du Conseil d'Etat j’examine actuellement un avenant à la convention fiscale franco-canadienne, pour l’appliquer à la Nouvelle-Calédonie, signé par le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et l’ambassadeur du Canada en France. On peut aller plus loin. En cas d’accession à la souveraineté, se posera la question de la représentation à l’ONU, décidée par l’assemblée générale sur proposition du conseil de sécurité. Andorre a été admis à l’ONU, bien que l’un de ses deux chefs d’Etat soit le Président de la République française, sans qu’Andorre soit dans la République française. Monaco, dont le prince est souverain mais le droit très proche du droit français, sans compter de nombreux accords imposés par la France par exemple en matière fiscale, en est aussi devenu membre. C’est la preuve que même l’ONU admet que l’indépendance pour de petites entités puisse comporter des abandons de souveraineté, plus ou moins volontairement consentis, à une autre puissance ou à une organisation régionale. 6) Comment organiser les institutions après la consultation et comment qualifier cette organisation ? L’Accord de Nouméa a pu être conclu notamment parce que l’on a renoncé à définir à quelle catégorie de collectivité la Nouvelle-Calédonie appartenait. Il n’est donc pas absolument indispensable de vouloir ranger la future organisation de la Nouvelle-Calédonie dans une des catégories du droit. Mais il n’est pas interdit – c’est tout l’intérêt de ce colloque – de les prendre en compte. Imaginons pour conclure plusieurs scénarii : a) Un accord est obtenu sur une solution de pleine souveraineté. La question prévue est posée ou bien, après révision constitutionnelle, une proposition d’accession à la pleine souveraineté avec des garanties est faite. Ces garanties pourraient résulter, d’une part, de l’indication des dispositions de la loi fondamentale du pays qui seraient adoptées et des stipulations des accords de coopération à passer avec la France, d’autre part, de l’insertion préalable dans la Constitution française, de dispositions spécifiques à la Nouvelle-Calédonie mentionnant, outre le changement de la question, la possibilité pour l’Etat d’accepter les compétences que la Nouvelle-Calédonie lui confierait. Ainsi serait formulée une des solutions de l’équation calédonienne, que l’on peut poser ainsi : Les indépendantistes ne pouvant renoncer à l’indépendance et le corps électoral accepté par tous dans l’Accord de Nouméa n’étant pas a priori majoritairement prêt à l’accepter, la solution est celle d’une organisation que les indépendantistes pourront regarder comme une forme d’indépendance dans le monde contemporain et dont les garanties seront telles que les non indépendantistes admettront qu’elle est acceptable, n’étant pas une indépendance au sens où ils la craignaient. b) Un accord est obtenu sur une solution dans la République, allant au-delà de l’Accord de Nouméa, définissant une citoyenneté stable et laissant à la Nouvelle-Calédonie un large pouvoir d’auto-organisation. On devra alors chercher les limites absolues de l’autonomie, quelque part du côté de la Catalogne ou de certains Etats américains. c) Aucun accord n’est trouvé. La réponse à la question sur l’accès à la pleine souveraineté est une ou plusieurs fois négative. Il faudra alors éviter qu’un échec confirmé ne conduise à une remise en cause complète du corps électoral, au point que l’on devrait rediscuter sans base acceptée du point de savoir comment concilier les deux légitimités pour ce qui est du droit de suffrage. La solution de type a est la plus difficile. Elle pourrait être la plus durable en tant qu’elle mettrait fin, par construction, à la revendication d’indépendance. Les solutions de type b peuvent s’écrire mais pourront-elles faire l’objet d’un accord ? Je garde confiance dans la capacité des Calédoniens à assumer une société pluriethnique viable parce que la situation du peuple d’origine aura été pleinement acceptée.