lundi 2 mai 2011


Naku press publie des extraits d’un article écrit par Thierry VIRCOULON dans le numéro spécial de Alternatives économiques, titré : l’Etat de la Mondialisation.


Afrique du Sud entre émergence et enlisement


Le président Jacob Zuma joue la carte de l'ouverture aux échanges mondiaux. Mais sur le plan interne, les défis du chômage , des inégalités et de la corruption restent entiers.

Alors que l'ancien chef de l'Etat Thabo Mbeki s'efforçait de mieux insérer l'Afrique du Sud sur la scène politique internationale( tentative d'obtenir un siège au Conseil de Sécurité des Nations unies, médiations dans des conflits etc…) Jacob Zuma a , dès son arrivée au pouvoir en Mais 2009 ; imprime un tournant plus économique à sa diplomatie. Il la souhaite résolument commerciale, au service d’un renforcement des échanges Sud-Sud face à la domination de l’axe Nord-Sud. Jacob Zuma aspire notamment à ce que son pays devienne membre du groupe des « BRIC » ( Brésil, Russie, Inde et Chine) ,les grands pays émergents. Ayant besoin d’investissements directs, l’Afrique du Sud démarche en particulier la Chine, le Brésil et l’Inde. Et vise avec New Delhi, qui a des liens historiques, un volume d’échanges global de 10 milliards de dollars, en 2012. ( 3 milliards de plus qu’en 2009), ce qui implique l’harmonisation de leurs tarifs douaniers. Mais qu’elle soit économique, politique ou sportive avec la Coupe du monde de football, la diplomatie sud africaine cherche toujours à montrer que la patrie de Nelson Mandela peut « jouer dans la cour des grands ». Reste que la persistance du dualisme social et économique de l’Afrique du Sud contredit cette ambition. Il se traduit par la cohabitation d’une économie moderne ( secteur financier, mines, tourisme, agriculture commerciale…) et d’une économie informelle, d’une population au standard de vie européen et d’une autre vivant dans l’extrême pauvreté ( 4.2 Millions de Sud Africains disposent de moins de 1 dollar par jour). Les effets du remarquable développement des prestations sociales depuis 1994 ( les bénéficiaires de l’aide sociale sont passés de 5.8 à 12 millions de personnes de la fin des années 1990 à 2009) et du black économic empowerment – politique menée pour accroître le rôle des Noirs dans le management et l’encadrement – ont été largement contrés apr la persistance d’un taux de chômage élevé ( 24% en 2009), touchant en priorité la population noire (28% de chômeurs contre 4.6% dans la communauté blanche), et d’une croissance insuffisante en raison d’investissements trop faibles : 3.3% de 1994 à 2010- un chiffre modeste au regard du taux de croissance africain moyen sur la même période ( 6%).

….. L’administration quant à elle, s’est ouverte, dans son recrutement à la diversité raciale et à modernisé son fonctionnement : gestion par objectifs, dévolution de certaines fonctions au secteur privé … Mais elle reste engluée dans la corruption. Après le ministère de l’Intérieur, c’est au tour du ministère des Mines d’être au cœur des affaires. Un moratoire de xis mois a été décrété en 2010 sur l’octroi des licences de prospection , afin de faire la lumière sur plusieurs cas impliquant des responsables du ministère. Et la liste n’est pas close…

En prenant appui sur les forces de gauche ( le South African Communist Party et la Cosatu, la principale centrale syndicale du Pays) en courtisant l’électorat pauvre de l’ANC( Congrès National Africain) contre l’élitiste Thabo Mbecki , Jacob Zuma a fait campagne de 2009 sur programme où le mot « social » figurait en lettre d’or. Ses promesses allaient de l’assurance maladie universelle à la gratuité de l’enseignement, en passant par la création d’emplois et la réforme foncière, thèmes incontournables de toute campagne électorale en Afrique du Sud. Elles lui ont permis une victoire confortable ( 65.9%) mais n’ont débouché jusqu’ici sur rien de concret.

…… Pour ne rien arranger , les tendances autoritaires de l’ANC perdurent ( comme la demande de créer un tribunal des médias, jugés trop critiques ) et le parti s’enlise dans des luttes internes. Face à cette fragilisation de l’ANC , l’opposition resserre ses ranges : l’Alliance démocratique d’Helen Zille, qui représente l’électorat libéral blanc, vient ainsi d’absorber les démocrates indépendants de Patricia de Lille, porte-parole de l’électorat métis. La dégradation interne de l’ANC est inquiétante car, quinze ans après la fin de l’apartheid , aucun autre parti libéral africain n’a émergé….

Naku press a fait le choix de publier cet article , pour aussi parler de l’Afrique du Sud , qui a été cité par certains dans le débat sur le drapeau . Le pays vu sous l’angle économique en fin 2010 nous laisse malgré tout perplexe face à une réalité qui semble , d’après les chiffres , être en faveur d’une minorité blanche.


Mise en ligne par Naku press le 02/05/2011 à 23h10