Mieux vaut tard que jamais, depuis notre dernière publication en mai , beaucoup de choses se sont passés dans le pays. En effet ce n'est seulement qu'en début juillet , exactement le 8 du mois qu'enfin un président du gouvernement a été nommé en la personne de Mr Louis MAPOU , du groupe Union Nationale pour l'Indépendance ( UNI) militant du Parti de Libération Kanak.
Bien évidemment que cela faisait plus de 5 mois que les langues déliraient dans le pays en ces termes:" les indépendantistes majoritaires au congrès , n'arrivent pas à s'entendre pour nommer un président". Mais plus on approchait de la date du référendum, l'intérêt national a pris le dessus, et c'est finalement l'Union Calédonienne qui a joué la carte pays , pour laisser le poste de la présidence au Palika . On se souvient ; les deux groupes indépendantistes, par des jeux d'alliance ont finalement obtenu chacun 3 sièges au gouvernement , donc on comprend bien que cela n'était pas facile de trancher rapidement sur le poste de la présidence du gouvernement.
Bref à l'heure qu'il est c'est chose faite, le gouvernement est donc aux mains d'une majorité indépendantiste intégrant l'Eveil Océanien. Cette majorité indépendantiste arrive aux commandes avec un pays dont les finances publiques sont au rouge avec en toile de fond la crise sanitaire à gérer, les caisses de la protection sociale déficitaire, presque en situation de cessation de paiement, et la proximité du 3ème et dernier référendum , l'évènement qui agite bien le débat politique ambiant au niveau du pays. Il faut simplement admettre d'emblée que ce n'est pas en 5 mois que les choses seront réglées.
Alors que l'arrivée d'un indépendantiste au pouvoir a fait le tour des médias dans le monde, pour la classe politique locale, et notamment la droite , c'est une bonne opportunité pour dénoncer ouvertement ce qu'ils appellent les limites des analyses ou du projet porté par les indépendantistes. L'Etat français dans sa stratégie de communication a publié un document intitulé : les conséquences en cas de Oui et celles en cas de Non . Un document qualifié par les indépendantistes "de document à charge contre le Oui " , car il ne fera que reprendre le système existant actuellement vu sous l'angle financier uniquement , mettant bien en avant le fait que si la France doit se retirer , ce sera aussi avec l'arrêt du financement alloué jusqu'à présent à différents niveaux du pays. Ou pour résumer , si la France se retire du pays , c'est le chaos!!! .
Ce document a au moins une bonne mission , celle d'être une aubaine pour la propagande en faveur du Non , bien que certaines déclarations de ces derniers temps laissent passer quelques nuances parlant d'un Non au pluriel , ou encore de reconnaitre que quelque soit le résultat , les calédoniens ce qui les préoccupent c'est comment résoudre les problématiques sociétales. Oui parce qu'objectivement , la NC est engagé dans un processus de décolonisation depuis la signature de l'Accord de Nouméa, et la France l'a encore affirmé en Février lors de la réunion au sommet avec une partie de la classe politique calédonienne : même si c'est le Non qui passe à ce dernier référendum , la France ne continuera plus à financer comme elle le faisait jusqu'à maintenant.
Donc au même titre que le message porté par le COVID à savoir : "revisitez vos modèles de société" , la Calédonie doit prouver par ses propres moyens sa capacité de retrouver un niveau de solvabilité de ses finances publiques , pour pouvoir de nouveau prétendre à des avances de trésorerie ou des prêts. Quand certains leaders indépendantistes disent que l'indépendance ce n'est pas qu'une question d'argent , cela veut dire qu'il faut reformuler en profondeur le modèle économique , et repositionner autrement les problématiques sociétales.
Beaucoup trop de réformes sociales ont fait du mal à la Calédonie , avec le revers de la médaille qui est celui de l'entretien d'un esprit d'assistanat. Trop de réformes sociales , contribuent à entretenir une population dans la dépendance , et donc irresponsable. Or pour construire un pays , qui doit compter sur ses propres moyens c'est avec une population debout , et responsable. Mais ce format de développement à coup de réformes sociales à tout va , c'est connu pour garantir un électorat mais sans plus. La fiscalité , qui doit justement veiller à ce qu'il y ait une bonne répartition des richesses en jouant à fond la règle d'équité fiscale , est frappée d'un espèce de mutisme, parce que dès qu'il s'agit de toucher au portefeuille des calédoniens , certains crient facilement aux loups , arguant la question du pouvoir d'achat.
Mais la réalité est dure, et elle finit par réguler certains propos , par exemple dans un article paru dans un des médias de la place , connu pour être anti indépendantiste, l'auteur reconnait qu'ici l'on parle beaucoup d'un pourcentage non négligeable de la population qui vivrait sous le seuil de la pauvreté , mais que cette lecture devait être relativisée. L'auteur reconnait enfin une place à ce qui relève de l'auto consommation , un élément qui jusque là n'était surtout pas retenu pour justement nuancer les conclusions données par les statistiques . Bien évidemment qu'il fallait s'arrêter uniquement sur le seuil de pauvreté , pour un effet alarmant , s'agissant d'un pays comme la Calédonie pourvu de nombreuses ressources naturelles . Et ironie du sort, cet argument est de temps en temps repris pour du mot à mot par les indépendantistes , dans des discours électoralistes certes, mais à deux pas de l'indépendance tout concept et tournure de phrase doivent être revus , il y a aussi d'autres indicateurs qui sont à prendre en compte pour une conclusion objective sur la situation réelle d'un pays .
Bref , comme dirait certains , il faut se décoloniser dans la tête, notre langage doit aussi emprunter le même chemin. Sortir des sentiers battus , c'est savoir saisir les opportunités pour poser le changement que l'on a tant prôné depuis ces longues années de marche pour une Kanaky indépendante et souveraine. Mais il y a espoir nous sommes tout juste à 1 mois et demi aux commandes du pays , simplement que le temps d'apprentissage doit être raccourci , car la population nous attend, et l'enjeu du référendum est déjà bien présent , il perturbe même les débats dans l'hémicycle du Congrès ....
Publication du 05 Septembre 2021 ( Photos , sources : Les Nouvelles calédoniennes).