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samedi 29 mai 2010
LE CNDPA : QUEL RÔLE AUJOURD¹HUI ? par Ué Sylvain en 2003
Cette note avait écrite par Ué Sylvain en 2003 avant l'apparition du projet généreux du Mwâ Kââ porté par le Conseil National des Droits du Peuple Autochtone en Kanaky/NC...
Dans son combat pour faire reconnaître ses droits, le peuple autochtone a usé diverses stratégies : la révolte armée comme en 1878 avec le Grand Chef Ataï et en 1917 avec le Grand Chef Noël Doui, la lutte pour les droits sociaux à partir des années 50 et la lutte politique depuis.
Depuis 1993, dans le cadre de l’année des peuples indigènes décrétée par les Nations Unies, le peuple kanak a, parallèlement à la lutte politique, adopté une démarche basée sur la reconnaissance des droits autochtones quelle que soit la couleur politique, syndicale et religieuse.
En 1994, le CNDPA est mis en place pour répondre à une double préoccupation : organiser la célébration du 24 septembre (devoir de mémoire) et constituer un espace de rencontres et d’échanges entre les autochtones.
L¹Accord de Nouméa, signé en 1998 par les représentants de l¹État français, de la droite coloniale et du peuple kanak le 4 mai 1998, ouvre des possibilités de reconnaissance pour le kanak en tant que peuple autochtone en plaçant son identité au centre du dispositif.
Néanmoins, la reconnaissance reste insuffisante ou limitée dans la mesure où l’Accord de Nouméa est d’abord un compromis politique historique entre les autochtones et les non autochtones.
Alors, des initiatives sont prises par les kanak, eux-même, bien souvent sur un plan local et relayées sur un plan national, non sans difficulté, pour combler les insuffisances.
Aujourd¹hui, on doit se poser cette question : quel est le rôle du CNDPA ?
Doit-il se contenter de ses deux missions premières, officielles ou jouer un rôle plus actif en accompagnant les initiatives locales ou nationales ?
S’appuyant sur ses dernières expériences, on peut affirmer que le CNDPA a joué son rôle à trois niveaux :
- Contribuer à la reconnaissance des droits autochtones pour le peuple kanak,
- Associer activement les citoyens dans la lutte,
- Elargir la lutte contre la « mainmise » sans vergogne des Multinationales.
A) Contribuer à la reconnaissance des droits autochtones pour le peuple kanak
On pourrait rappeler qu’effectivement, le CNDPA, modestement, a apporté sa contribution pour que les kanak se rassemblent et palabrent pour défendre et promouvoir leurs droits en tant qu’autochtones. Les célébrations autour des 24 septembre ont été l’occasion pour débattre sur des thèmes. Par ailleurs, durant ces dernières années, notamment depuis l’ère Accord de Nouméa, on a vu apparaître des initiatives.
1 - Les célébrations du 24 septembre et les thèmes
1. 1 L’ère Accords de Matignon ou la conscientisation de la question autochtone
1993 a été décrétée par l'ONU comme année internationale du peuple indigène, les kanak l’ont fêté à leur manière dans toute la kanaky pour aboutir en apothéose dans la région Paici-Cémuki à Poindimié.
1994, c’est la naissance du CNDPA. C’est la région de Drubéa-Kaponé (Kowé Kara) qui accueille pour célébrer l'année de l'enfant kanak.
1995, le CNDPA se rend dans la région de Xaracùù (La Foa) pour célébrer l'Igname, un produit non seulement vivrier mais sacré dans la culture kanak.
1996, c'est au tour de la région Ajié-Arhô (Téné-Bourail). Le thème à l’ordre du jour : la Terre, le Foncier.
1997, les gens de la Grande Terre embarquent dans la pirogue pour les îles notamment Drehu. C’est à Wageden où jaillit l'idée de la Charte du Peuple Kanak, Peuple Autochtone en Nouvelle Calédonie.
1.2 L’ère Accord de Nouméa ou la prise en compte officielle de la question autochtone
1998, à Balade, dans la région de Hoot Ma Whaap, une nouvelle ère s’ouvre dans les relations entre le peuple kanak et ceux considérés comme les victimes de l'histoire.
1999, seconde embarcation dans la pirogue pour les rochers de Nengone. C’est la réaffirmation des droits du peuple autochtone dans le nouveau contexte institutionnel qu'est l'Accord de Nouméa.
2000, De Nengoné à Iaii pour débattre sur le thème "Droit à la terre et à la ressource".
2001, de retour sur la Grande Terre. C¹est la 9e édition à Waho (Yaté) placée sous le signe "Du développement économique, de l'Échange et de la Communication".
2002, la région Xaracùù autorise le CNDPA à débattre à Canala sur un thème très actuel " le patrimoine minier et les autochtones ".
2 - Les initiatives locales et nationales
Certaines de ces initiatives datent d’avant les accords et d’autres après leurs signatures…
2.1 Les associations
- Association pour le Développement de la Santé Pour le Peuple Kanak
(ADSPPK)
- Union des Groupements des Parents d’élèves (UGPE)
- Pacific Islands Association No Government Organization (PIANGO)
- etc.
2.2 Les initiatives locales et régionales- le Comité Réébùù nhu
2.3 La défense et la promotion sur le plan institutionnel- les conseils d¹aire
- le sénat coutumier
B) Associer activement les citoyens dans la lutte autochtone
Dès qu’il était en mesure de le réaliser, le peuple kanak a toujours mis en avant les intérêts des calédoniens. Par contre, les représentants des autres communautés, notamment celles regroupées politiquement dans la droite coloniale, se sont toujours contentés du statut quo qui leur offrait et assurait un statut de privilégiés.
1 - Le progrès social est avant tout grâce à la lutte du peuple autochtone
1.1. Les droits sociaux obtenus dans les années 50-60
On peut citer les acquis et droits comme la CAFAT, le tribunal du travail
(1953), conventions collectives (1953), office de la main d’oeuvre (1956), congé payé (1956), etc.
1.2. Les Accords de Matignon et l’Accord de Nouméa
Paix, Reconnaissance, Rééquilibrage, Identité kanak, Émancipation, Citoyenneté sont quelques maîtres-mots de ces deux derniers cadres institutionnels qui ont été possibles après quelques sacrifices de la part des kanak
2 - Le rôle de la droite coloniale : freiner la revendication
2.1 - Elle s’est toujours contentée du statut quo.
Par définition même, la droite coloniale s’est opposée à ce que le peuple autochtone revendique le droit à l’autodétermination. Ainsi, toutes les évolutions que le pays a connues ont été grâce à des éléments extérieurs (l’arrivée des américains pendant la seconde guerre mondiale, les changements institutionnels en France après la Libération, etc.) ou aux mobilisations kanak (cf. paragraphe précédent - Le progrès social est avant tout grâce à la lutte du peuple autochtone -)
2.2 - Même aujourd'hui, sous l’ère Accord de Nouméa, elle a peu changé
2.2.1 - Non seulement, elle méprise les droits du peuple autochtone alors que certains droits sont inscrits dans l’Accord de Nouméa.
- Dans la ville de Nouméa, force est de constater que l’identité kanak n’est pas encore à l’ordre du jour dans la prise en compte des kanak au sein de l’institution, dans la politique urbaine.
- Dans la commune de Yaté, la création du Comité de suivi correspond au fait que le promoteur du projet Goro et les responsables de la province sud risquent de négliger, du moins minimiser, les intérêts des populations autochtones locales.
2.2.2 - Mais, par voie de conséquence, elle méprise également des droits des citoyens en général (ex : affaire du permis de recherche A à la Multinationale).
Le CNDPA est à l’initiative de la mise en place du Collectif pour la Défense et la Maîtrise du Patrimoine de Prony - Le Collectif est un espace permettant d¹accueillir les non-kanak, c¹est à dire les autres citoyens, pour les associer dans la défense du patrimoine de Prony.
C) Élargir la lutte contre la mainmise des Multinationales
1 – S’inscrire dans la démarche des nations unies
Il est primordial de nouer des contacts avec l’ONU afin de donner une légitimité supplémentaire aux initiatives développées au niveau local.
Au niveau des actions en cours, on peut citer quelques-unes unes :
- le 9 août, choisi par l’ONU, est une journée dédiée aux peuples indigènes dans le monde,
- la décennie des peuples indigènes 1994-2004,
- la déclaration universelle des droits des peuples indigènes qui sera définitive en 2005
Ainsi, chaque année, en juillet, se déroule à Genève, la réunion du groupe de travail - À trois reprises, le CNDPA a envoyé des délégations. Est-ce encore une priorité cette année ?
2 - Avoir des relations directes avec les autres peuples autochtones
Pour diverses raisons, les peuples autochtones les plus en vue pour les kanak sont les Inuits et les Innus au Canada, les aborigènes en Australie et les Maories en Nouvelle Zélande.
Il faut noter que le comité de suivi de Yaté a fait un déplacement au Canada récemment.
Quels sont les moyens que donne/se dote le CNDPA pour avoir ces relations ?
Conclusion : comment, donc, placer l’année 2003 qui marque le 150e anniversaire de la prise de possession officielle unilatérale du pays kanak par la France ?
Ué Sylvain